Baromètre RH : mise en perspective dans les filières automobiles

Le secteur automobile de la distribution et des services, en pleine mutation technologique, continue de recruter tout en affrontant des tensions persistantes sur certains métiers clés. Pour éclairer ces évolutions, Florent Saclier présente les principaux indicateurs du marché de l’emploi dans la filière : dynamiques de recrutement, turnover, féminisation, alternance… Un échange pour mieux comprendre les défis RH actuels et les opportunités de demain.

Le Baromètre RH en images & commentaires

Florent, pour commencer, quel est l’objectif de cette présentation ?

L’objectif, c’est de partager les grandes tendances de l’emploi dans la filière automobile, et de les mettre en perspective avec celles du marché global. Ce qu’on cherche, c’est à identifier ce qui est spécifique à l’automobile : ce qui représente des menaces, oui, mais aussi les opportunités qui se dessinent pour l’emploi dans notre secteur.

Et justement, quels sont les grands défis que tu observes aujourd’hui ?

Il y en a plusieurs. Déjà, un marché de plus en plus concurrentiel, et une transformation rapide sous l’impact de l’intelligence artificielle. On fait face aussi à la pénurie de compétences sur certains profils très recherchés.

Et en parallèle, on voit émerger de nouvelles attentes : la RSE, la digitalisation de la relation client — désormais omnicanale — et puis de nouvelles cultures du travail, avec une appétence croissante pour la mobilité professionnelle… ce qui se traduit par un turnover plus élevé. Enfin, il y a aussi des attentes très différentes selon les générations et les typologies de talents qu’on recrute.

Pour bien comprendre le secteur dont on parle, peux-tu nous rappeler son poids en France ?

Bien sûr. Aujourd’hui, l’automobile représente plus de 620 000 emplois en France (chiffres 2024). Et on distingue vraiment deux grands blocs : • la distribution et les services de proximité — commerce & réparation — qui concentrent 452 000 emplois, • et la partie « amont » — constructeurs et équipementiers — avec 169 000 emplois.

Et comment évoluent ces métiers industriels ?

La tendance est très claire : l’industrie automobile française recule. En 2006, on avait près de 300 000 emplois dans la construction et chez les équipementiers… Aujourd’hui, on n’en compte plus que 169 000. Une chute régulière, liée notamment à la mondialisation et au déplacement de la production hors de France.

C’est donc l’inverse du côté distribution ?

Exactement. Les métiers du commerce et de la réparation auto sont passés d’environ 400 000 emplois en 2006 à plus de 450 000 aujourd’hui. Malgré un creux après la crise de 2013, c’est un secteur qui retrouve une vraie dynamique.

Quels sont les points saillants à retenir ?

Déjà trois chiffres importants :

  • 80 % des emplois sont dans des PME / ETI
  • un tiers des emplois sont des services de proximité
  • seulement 23 % des postes sont occupés par des femmes mais avec de fortes disparités selon les métiers.

Et une belle dynamique de recrutement :

Elle est clairement positive. En 2024, on compte 55 000 recrutements dans la filière, soit +20 % vs 2023. Le taux de recrutements non pourvus baisse de 15 %. Et surtout, 36 % des recrutements sont liés à du développement d’activité. Ça montre que, malgré les mutations, beaucoup d’acteurs prospèrent.

Quels indicateurs RH doivent particulièrement attirer notre attention ?

Trois éléments clés : 

  • Turnover : +18 % → mobilité accrue 
  • Absentéisme : 5,9 % → tension sociale latente 
  • Alternance : +6 % → 70 000 contrats, 73 % d’insertion → une vraie réussite

Mais malgré cette dynamique, le recrutement reste compliqué

70 % des entreprises du secteur déclarent avoir du mal à recruter ; contre 50 % tous secteurs confondus. 

Et sur certains métiers, c’est encore plus critique : 

  • 77 % de difficulté à recruter des mécaniciens 
  • 81 % pour des carrossiers 
  • mais seulement 43 % pour les commerciaux

Les tendances nationales sont là… mais l’automobile reste structurellement en tension.

Parlons de la féminisation du secteur… où en est-on ?

On progresse, mais lentement. La France est à 23 %, mieux que l’Allemagne (19 %), mais loin derrière l’Espagne. Et les chiffres cachent une réalité :

  • 80 % de femmes sur des postes administratifs
  • 1 % seulement sur la maintenance❗️

Il y a un énorme potentiel de diversification et d’accès à des nouveaux viviers de talents.

L’arrivée de l’électrique et du digital peut changer la donne. En effet les pays où ces transformations sont les plus avancées — comme la Suède — voient une féminisation plus forte des métiers techniques. Ce sont des domaines où l’intégration des femmes est plus naturelle, moins contrainte par l’héritage « mécanique » traditionnel du secteur.

Et sur le turnover… qu’est-ce qui pousse les collaborateurs à partir ?

D’abord, la rémunération ou une envie d’évolution. Mais juste derrière, on retrouve deux enjeux majeurs : • les conditions de travail • le manque de reconnaissance

Et puis il y a le management : 1 personne sur 2 évoque un déficit d’accompagnement ou de formation. C’est encore plus vrai chez les moins de 30 ans : 2 jeunes sur 3 envisagent une mobilité à court terme.

Au fond, Florent, comment vois-tu l’avenir du secteur automobile ?

Ce n’est pas un secteur du passé.

C’est un secteur d’avenir. Il innove, il se transforme : donc il recrute !

Et il a besoin de nouvelles forces vives, notamment de femmes, pour répondre aux défis technologiques et humains qui s’ouvrent aujourd’hui devant lui.

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